Aborder le thème de l’esclavage ? Cap sur Nantes…et voguent les galères !!

Deux mardis consécutifs auront été nécessaires pour assurer le déplacement à Nantes de tout le niveau 4e : château des Ducs de Bretagne pour y visiter le Musée de l’Esclavage puis Mémorial de l’Abolition de l’Esclavage. Ainsi, le 19 mars, ce sont les classes de 4B et 4D qui ont couvert la distance, avant que ne le fassent les 4A et 4C le mardi 26 ! Porteurs du projet : deux professeurs d’histoire, madame Le Pajolec et monsieur Abraham, déjà rompus à ce parcours. Pourtant, chacun escorté d’une fine équipe, ils n’auraient en aucun cas imaginé les péripéties qui allaient émailler leur belle sortie… Suivez le guide !!

Rendez-vous était donné aux deux équipées pour un départ du collège à 7h00 : deux absents au bataillon pour la première sortie, trois pour la seconde : rude réalité…le car n’attend pas…quand près de trois heures de route l’attendent ! Équipe A : 57 élèves, M.Abraham et ses accompagnatrices Mmes Grain, Noël et Tailhades le 19 mars ; équipe B : 55 élèves, Mme Le Pajolec et ses accompagnatrices Mmes Decriem, Melscoët et Rongieras le 26. Si le premier groupe s’est octroyé le luxe de jouer les touristes en s’accordant une pause vers 9h30 à une station service faisant aire de repos, le second a filé vers Nantes sans délai.

Les bonnes surprises à l’arrivée ? 10h40 : le 19 mars, l’équipe A est au château, à l’heure prévue. Excellent début ?? Pas vraiment….car annonce réjouissante sitôt accueillis : après-midi perturbée, voire impossible car le Mémorial est fermé, les guides en grève…et le quartier à visiter est interdit à cause des manifestations. Il en aurait fallu davantage pour entamer l’enthousiasme à tout crin de l’équipe A qui effectue tout de même la visite du musée prévue dans le château. Avant 10h30, le mardi 26 : l’équipe B est dans la place…sauf que Mme Le Pajolec a appris par téléphone, dans le car, à l’arrivée dans Nantes, que l’un des groupes se verrait privé de guide pour la visite de la ville et du Mémorial : congés maladie !! 4A ou 4C ? On ne sait pas encore sur quelle classe se répercutera ce désagrément. Dans l’expectative, on ne se laisse pas démoraliser et on prend la pose, tout sourires, sous un soleil radieux et un ciel bleu roi !

4AC en zone royale !!

La visite du musée ? Après le dépôt laborieux des sacs à dos et autres blousons à la consigne, tous les élèves et accompagnateurs ont été équipés d’écouteurs afin de ne rien perdre des explications de la guide responsable de la visite. Sauf que pour l’équipe A, ce furent deux guides, une pour chaque classe. Pas prévu… Sur l’heure et demie de parcours, il y eut fort à voir, écouter, questionner. Plusieurs salles jalonnaient le parcours. Il fallut d’abord recontextualiser la situation de Nantes au 17e siècle, en fond d’estuaire de la Loire.

Plan de Nantes

Passage devant une vaste maquette présentant la ville, ses remparts, son pont…et première question de Sarah : « Mais qui a réalisé cette maquette ? » Si le concepteur était anonyme, on a en revanche pu mettre un nom, dans la deuxième salle, sur un portrait bien en vue : un tableau représentant Gratien Libault, armateur ayant prospéré dans le commerce négrier et élu ensuite maire de Nantes.

Gratien Libault

On a pu aussi découvrir un fanal de poupe, sorte de phare à chandelier, immédiatement identifié par Dylan !

Fanal de poupe

Incontournable, la description de l’Isle (Île) Feydeau : quartier où se trouvent les immeubles des armateurs négriers, en bordure du fleuve, et aujourd’hui recouvert par le passage du tramway. Cela, certains élèves seulement le verront in situ pendant l’après-midi… La découverte du passé, cela se gagne aussi à la force des mollets : les vaillants visiteurs ont dû affronter les escaliers, nombreux, qui jalonnent le parcours et le répartissent sur les différents étages. Ils ont au passage pu faire d’étonnantes rencontres : celle d’une créature fantastique tapie au creux d’un mur ou celle d’une cheminée…suspendue ! Un château, c’est toujours empli de mystères !

L’ascension vers la connaissance !
L’Elfe de maison ??
Une cheminée suspendue ?..

Puis vint un temps fort de la visite avec une salle, qui restitue un peu les volumes à l’intérieur d’un navire, consacrée à la traversée Europe/Afrique. On a pu y découvrir, d’une part, les marchandises emportées (indiennes, pacotilles, vieux fusils…) mais surtout les conditions de vie des esclaves sur le bateau. Hygiène déplorable, entassement dans les écoutilles qui ne laissaient pas même aux esclaves de quoi se tenir debout !

Gros plan sur les écoutilles

C’en fut sans doute trop pour Annaëlle, de l’équipe A, qui a fait les frais d’un malaise vagal : chaleur ou grosse fringale ? Toujours est-il qu’il a fallu, pour elle, arrêter ce voyage houleux et faire escale un moment ! Pour tous les autres, il était temps de se pencher sur la maquette d’une plantation aux Antilles : où étaient logés les esclaves ? Pourquoi plusieurs secteurs d’habitation ? Et la demeure des maîtres ? C’est là que l’on découvre la différence de traitement entre les esclaves de la plantation et les nouveaux arrivants, nommés « bossales ». Les élèves connaissaient le trop fameux « Code noir » qui sera rédigé afin de répondre aux questions de « gestion » des esclaves et de leurs éventuels écarts de conduite.

Le Code Noir

On évoque alors les cas de révolte, à Saint-Domingue. On parle des fuyards et des châtiments qui leur étaient réservés : amputations, port d’un collier dont la conception laisse pantois : de quoi se crocheter et s’emmêler dans la végétation luxuriante…et s’y faire prendre sans possibilité d’en réchapper.

Maquette d’une plantation
Collier d’esclave fuyard…

Un étage plus haut encore, voici les groupes devant une vitrine reconstituant un intérieur bourgeois et qui rappelle de par la présence de mobilier, ornements et vaisselle luxueuse, l’enrichissement réalisé grâce à la traite négrière… et l’ostentation du train de vie qui allait avec. On note évidemment la présence d’une chocolatière : le chocolat, produit lié à la traite des noirs, devient une boisson à la mode dont on coupe l’amertume avec l’ajout de sucre. Côté élèves, on écoute et on intervient ; côté enseignants, on ne manque pas de saluer le sérieux de cette attitude, adoptée par tous les groupes.

Echanges nourris !

Dernier étage enfin, tout se mérite : merci à la technologie d’offrir de ce sommet du château un point de visite virtuelle de Nantes au XVIIIè s. : balade dans l’Îsle Feydeau notamment. Regroupés autour d’écrans disposés en îlots -ça tombe bien !-, les élèves se sont prêtés au jeu du survol de Nantes en montgolfière. Et monsieur Abraham, en arrière-plan sur la photo, a eu l’air particulièrement enthousiasmé par ce type de situation d’apprentissage !!!!

Visite virtuelle
M.Abraham féru du virtuel !

Vers 13h00, voici venu le temps du pique-nique, moment toujours ardemment attendu de ce type de sortie : les voyages en mer, ça ouvre l’appétit.

Pique-nique à Château-Plage !!

Pour l’équipe A, il eut lieu dans les douves du château, avec soupe à la grimace pour Mahimity dont la rotule se fait dolente…et au dessert confirmation de l’annulation de la visite dans Nantes, y compris du Mémorial, prévue pour l’après-midi !! Bien restauré et dès lors plein de ressources, monsieur Abraham envisage de ce fait, vers 14h00, la possibilité de se replier sur une exposition de photos au château également : ce qui fut fait….sauf que vers 14h10, alerte : il faut rejoindre le car qui ne peut pas attendre le groupe au lieu prévu à cause des manifestants qui approchent. Donc, bagages pliés et marche d’une bonne demi-heure (bonheur pour Kellys, qui avance avec béquilles…..et pour Briac, grand seigneur, qui joue les porteurs pour les deux demoiselles blessées !!) jusqu’aux « Machines de l’île »….elles-mêmes fermées pour cause de manifestation… Quelle force de caractère que celle de ce groupe qui prend alors la pose avec le sourire pour une séance photo devant un éléphant….avant de rejoindre le car et de revenir au port de Moncontour !!

4BD et les machines…fermées !

Pour l’équipe B, portée par un soleil radieux et une vie urbaine bien plus sereine, les augures sont meilleurs : tout le monde peut arpenter les rues de Nantes et gagner le Mémorial….mais pas de guide pour tous ! Seule la classe de 4C aura ce privilège, ce qui sied fortement à mesdames Decriem et Melscoët, qui n’étant « que » professeurs de lettres, n’envisageaient pas d’assurer la présentation des lieux les plus marquants de ce passé local. Madame Le Pajolec, forte de sa science historique, a choisi de mener sa troupe de 4A au Mémorial et d’y attendre les flâneurs du jour. Qu’ont donc vu ces « happy few » ? Le groupe, conduit par leur guide du matin, s’est d’abord dirigé vers le point focal et fondateur du commerce négrier nantais, l’Îsle Feydeau, zone aujourd’hui recouverte par le passage du tramway. Puis, on a rejoint le quartier des armateurs, après une pause non loin de l’énigmatique statue du « Pas de côté » et une fine observation de la rue Kervégan (maisons en tuffeau qui sont des constructions sur pilotis renforcés par un maillage à la hollandaise afin d’assurer une stabilité accrue des fondations). Devant les belles demeures de ce quartier, pause « pelouse » et étude des façades. On y repère le cocktail incontournable de leurs riches propriétaires de l’époque : balcons en fer forgé et mascarons, ornements d’inspiration mythologiques souvent, ethnologiques parfois, censés évoquer le voyage, le commerce.

Pause dans le quartier des armateurs !
Mascarons des 5 continents

Grâce à la guide passe-partout, le groupe entre dans une cour privée d’armateur : espace privilégié au sein de la ville. Au fil de la déambulation, on recroise des mascarons, parfois étonnamment associés aux commerces actuels !

Visite privée pour les 4C !
Un mascaron très rock and roll !!

Au terme du parcours, c’est l’arrivée au Mémorial de l’Abolition de l’Esclavage. Surprise ! Un mémorial…au sol ??

Un mémorial au sol ?

Eh oui ! Il a fallu comprendre que la notion de voyage allait être au cœur de ce lieu de mémoire. C’est alors que le groupe a entamé une marche un peu zigzagante afin de repérer au sol, au fil d’une multitude de plaques, le nom des navires ayant participé au commerce des esclaves, avec mention de l’année de leur trajet. Suivant le sillage du « Neptune », de l’« Auguste » ou du « Jupiter », l’équipe B s’est retrouvée au complet au sein même du Mémorial, comme à fond de cale. Tout juste le temps d’une présentation par la guide et d’un ordre de mission donné par madame Le Pajolec, et voilà nos collégiens en exploration souterraine ou presque : atmosphère empreinte de mystère, lumière voilée et indirecte, on avance au fond de ce Mémorial qui aligne le mot « Liberté » en 47 langues, ainsi que des textes et citations de personnalités. Chacun y retrouve un nom connu : Césaire, Mandela, Martin Luther King… On prend des notes avec soin, tandis que la guide sur le départ confie n’avoir encore jamais rencontré de groupe scolaire s’exclamant : « Déjà ? C’est passé trop vite ! »

Les 4AC à fond de cale au Mémorial !
Lieu de mémoire…

Le temps file en effet et il est l’heure de retrouver le car : cap sur Moncontour ! Mais il aurait été trop simple de rouler sans roulis… ! Sans doute fatiguées par la journée, deux jeunes filles ont besoin de la sophrologie de madame Decriem pour apaiser leur crise d’angoisse, tandis que tombe, laconique, la question qui fait tsunami à bord : « Nantes, c’est pas en Bretagne ? C’est donc dans le Morbihan !? » Les voyages forment la jeunesse… Belles journées en tout cas, malgré les aléas !!

Comme c’est madame Melscoët qui se charge de la rédaction de cet article, elle en profite pour glisser un clin d’œil aux lecteurs de mangas : même les lieux chargés d’Histoire adoptent ce genre littéraire !!!

La photo qui n’a rien à voir avec le thème !!!!!